Le nom de Corexsolar International a récemment suscité beaucoup d’intérêt dans le secteur énergétique, surtout pour une entreprise basée à la Réunion. Avant d’aborder les aspects polémiques, pourriez-vous nous expliquer quand et comment Corexsolar International a commencé à s’intéresser à Maurice ?
Corexsolar International est un producteur d’énergie spécialisé dans la conception, la construction et la gestion de fermes photovoltaïques. L’entreprise a démarré ses activités en 2012 à l’île de la Réunion.
Nous avons réalisé avec succès de nombreux projets de ferme photovoltaïque à la Réunion comme en France, et avons étendu, au fil du temps, notre expertise à Mayotte et à l’île Maurice. C’est en poursuivant notre stratégie d’expansion que nous avons décidé, en 2016, de mettre notre expertise et notre expérience au service du marché mauricien et avons ainsi lancé Corexsolar International (Mauritius) Ltd.
À cette époque, Maurice affichait déjà son ambition de promouvoir l’énergie renouvelable afin de réduire son impact carbone. La ferme solaire de Petite-Rivière (5 MWp), mise en service début 2020, est notre première réalisation à Maurice. En 2018, CorexSolar International (Mauritius) Ltd est entrée en partenariat avec un conglomérat mauricien, mais nous nous sommes séparés en 2021. Néanmoins, fort de notre expérience et notre capacité à développer des projets photovoltaïques d’envergure, nous avons continué à répondre aux appels d’offres dans ce domaine et avons été lauréats de plusieurs projets. Certains des projets ont déjà été complétés, tandis que d’autres sont en cours.
L’entreprise est accom-pagnée dans la réalisation des projets par des partenaires financiers étrangers. Nous pouvons aussi compter sur le soutien et l’expertise d’une trentaine de professionnels, tous Mauriciens, qui travaillent sur des projets de ferme photovoltaïque à Maurice, mais aussi dans les pays où nous opérons.
Avec plus d’une dizaine d’années d’expérience et de nombreux projets réalisés avec succès sur les différents marchés où nous sommes présents, Corexsolar International s’est positionnée aujourd’hui comme un acteur important dans le secteur des énergies renouvelables. La société, qui affirme aussi sa présence énergétique à l’île de la Réunion, Mayotte et Madagascar, a déjà sécurisé un portefeuille de projets en cours de développement, pour un total de 100 mégawatts, et continue de croître dans le secteur des énergies renouvelables dans la région océan Indien. Et nous sommes fiers de pouvoir contribuer à l’objectif durable de Maurice d’atteindre 60 % d’énergies renouvelables dans le mix énergétique d’ici 2030.
Pourriez-vous nous en dire plus sur les projets lancés par Corexsolar International, à Maurice et à Rodrigues, depuis votre installation dans l’île ?
Depuis notre installation à Maurice, nous avons participé à plusieurs appels d’offres, lancés principalement par le Central Electricity Board (CEB), et en avons remporté certains. Parmi les projets que nous avons déjà complétés figurent 2 MWp d’installation sur toitures, une ferme solaire de 2 MWp à Henrietta et aussi la mise en service de notre installation de ferme photovoltaïque, d’une capacité de 5 MWp, à Petite-Rivière.
Nous avons d’autres projets en cours de réalisation, notamment deux fermes photovoltaïques d’une capacité totale de 25 MWp, et 3 000 kits – de 2 kW – photovoltaïques en toiture. Par ailleurs, en 2023, nous avons été lauréat des projets REHF avec stockage, qui sont actuellement en phase de développement.
En ce qui concerne Rodrigues, nous venons tout juste de mettre en service un projet de 1 MWp à Grenade.
En 2023, Corexsolar International a été au centre de l’actualité à la suite des dénonciations de certains membres de l’opposition accusant l’entreprise d’avoir trompé le CEB en prétendant avoir déjà acquis un terrain pour la construction d’une ferme solaire, alors qu’en réalité ce terrain n’a pas été obtenu. Cette affaire a gravement terni la réputation et la crédibilité de Corexsolar International. Que répondez-vous à ces allégations ?
Corexsolar International est une société sérieuse et indépendante, qui a réalisé plusieurs projets à Maurice comme ailleurs dans la région, et aussi en France. Nous avons, à chaque fois, tenu nos engagements.
Pour répondre à votre question, il faut savoir que les enjeux financiers sur ce type de projet, évalué à plusieurs millions de dollars, sont conséquents. Les opérateurs doivent fournir des garanties importantes lors de la soumission des offres. Et, comme vous le savez, Corexsolar International paye actuellement des pénalités journalières de Rs 420 000 depuis novembre dernier, pour le retard accusé dans le démarrage du projet. Nous ne pouvons donc nous permettre des approximations.
En ce qui concerne le terrain, dans l’appel d’offres, il était demandé aux soumissionnaires de fournir une lettre d’intérêt. Nous avons respecté cette condition. Il faut comprendre qu’un terrain est toujours à risque jusqu’à la phase finale de développement et l’obtention des permis définitifs, dont les études environnementales (EIA).
Avant de porter notre choix sur le terrain initial, nous en avions visité d’autres, mais celui-ci était le plus approprié, car il était proche d’une station de raccordement du CEB. Nous avions effectué plusieurs visites sur le terrain choisi en compagnie de l’intermédiaire, qui n’avait pas souhaité nous dévoiler le nom des propriétaires avant que nous ayons répondu à l’appel d’offres. Une pratique courante dans le métier.
Après la signature du PPA, nous avons relancé l’intermédiaire à plusieurs reprises pour signer la promesse de bail. Mais n’arrivant pas à confirmer cette étape, nous avons immédiatement informé le CEB et avons entamé les démarches pour trouver un terrain alternatif.
Il faut savoir que lors de la phase de clarification avant la soumission des d’offres, un des soumissionnaires avaient demandé s’il était possible de changer de terrain et le CEB avait répondu par l’affirmative.
Quel était le rôle de l’intermédiaire dans cette affaire ? Est-il exact de dire que cet intermédiaire a effectivement convaincu Corexsolar International que le terrain pouvait être obtenu ?
Nous avions déjà travaillé avec l’intermédiaire en question dans le passé pour un autre appel d’offres et nous n’avions eu aucun mal à sécuriser le terrain. Lors de la visite du terrain de Belle-Vue, l’intermédiaire nous avait laissé entendre que le site était une propriété familiale, sans nous donner plus de détails.
Certains éléments d’information laissent entendre que Corexsolar International n’a pas immédiatement opté pour la transparence. L’entreprise est accusée de ne pas avoir informé immédiatement le CEB de son échec à obtenir le terrain nécessaire pour le projet…
Comme expliqué plus haut, nous avons relancé l’intermédiaire à plusieurs reprises. Et, en l’absence de réponses de sa part, nous avons informé le CEB de notre décision de trouver un terrain alternatif. Nous nous sommes basés sur un point de droit et les clarifications fournies pendant la phase de l’appel d’offres, c’est-à-dire que le changement de terrain était possible, pour appuyer notre demande en ce sens.
Cette controverse a mis en lumière les efforts du CEB pour maintenir le contrat de construction de la ferme solaire entre les mains de Corexsolar International, malgré un premier avis juridique défavorable. Ces actions ont conduit certains membres de l’opposition à affirmer que Corexsolar International avait bénéficié de plusieurs protections et passe-droits. Vos commentaires…
Nous n’avons aucun parti pris, voire de relation privilégiée avec le CEB. Nous sommes un opérateur indépendant dans le secteur des énergies renouvelables, qui a fait ses preuves et nous entretenons de bonnes relations d’affaires avec tous nos partenaires.
Nous n’avons bénéficié d’aucune protection du CEB. Nous avons répondu, comme à chaque fois, à un appel d’offres et avons soumis tous les documents demandés en respectant toutes les conditions.
Nous avons été lauréats sur ce projet parce que nous avions répondu à toutes les conditions de l’appel d’offres et notre offre était plus compétitive, soit environ 10 à 15 % moins chère que les autres soumissionnaires. Ce qui représente quand même, sur toute la durée du contrat, c’est-à-dire 20 ans, une économie d’environ Rs 2 milliards pour le CEB.
Il est important de faire ressortir que le changement de terrain ne change en aucun cas les conditions existantes du PPA. Notre prix de vente et le point de raccordement au réseau du CEB restent inchangés.
Au contraire, il affecte de manière importante nos coûts d’investissements. Car, plus la ferme est loin de la station de raccordement, plus les coûts de raccordement sont élevés. Et pour ce projet, il est bon de préciser que c’est Corexsolar International qui doit trouver le financement de Rs 5 milliards pour assurer la conception, le développement, la construction et la gestion de la ferme photovoltaïque.
Par la suite, Corexsolar International a rencontré des difficultés pour obtenir un deuxième terrain à Baie-du-Tombeau, ce qui a de nouveau remis en question la fiabilité de l’entreprise.
Il ne s’agit pas de la fiabilité de l’entreprise, mais des difficultés à sécuriser du foncier, car, pour rappel, nous recherchons un terrain de plus de 200 arpents. Nous avions effectivement entamé des démarches auprès d’un propriétaire foncier pour un terrain, que nous avions identifié à Baie-du-Tombeau. Nous avions atteint un stade avancé dans les négociations, mais au moment de procéder à la signature des contrats en décembre dernier, le propriétaire s’est rétracté.
Cette situation a effectivement joué en notre défaveur, car il a fallu recommencer les négociations pour essayer de sécuriser un autre terrain. En attendant, nous payons des pénalités journalières de Rs 420 000 au CEB.
En février dernier, cela a fait un an depuis que le CEB a attribué le contrat à Corexsolar International et que le projet n’a toujours pas démarré. Cela ne renforce-t-il pas l’argument de l’opposition selon lequel vous avez bénéficié de largesses de la part du CEB ?
Contrairement à ce que l’on croit, le projet a démarré à partir du moment où nous avons obtenu l’appel d’offres. Il y a un certain nombre de sujets de développement qui sont faits en parallèle avec les démarches foncières, notamment la question de bancabilité, la recherche de partenaires financiers, la conception et le design du projet, ainsi que la phase d’études et de « permitting », entre autres. Nous avons bien avancé sur chacun de ces aspects.
Nous mettons tout en œuvre pour nous assurer que le projet puisse s’achever dans les meilleurs délais. Mais il faut savoir qu’il y a de nombreux obstacles dans le développement des projets, inhérents à Corexsolar International et auxquels tous les producteurs d’énergie sont confrontés.
Au mois de novembre, le CEB a appliqué des sanctions financières contre Corexsolar International en raison des retards concernant la sécurisation du terrain nécessaire pour le projet. Les pénalités financières imposées, s’élevant à plus de Rs 30 millions, ne compromettent-elles pas votre capacité financière à réaliser ce projet ?
Au risque de nous répéter, Corexsolar International est une entreprise sérieuse et indépendante. Nous avons des partenaires financiers qui nous suivent sur nos projets. La preuve est nous n’avons rencontré aucune difficulté sur les projets réalisés jusqu’ici. Nous avons toujours tenu nos engagements. Et puis, nous avons toujours été en mesure de fournir les garanties demandées.
Certes, cette situation, surtout la polémique créée autour de l’allocation de ce contrat, nous rend la tâche un peu plus difficile auprès de nos partenaires financiers, mais heureusement que nous avons leur confiance. D’un ordre général, ce genre de polémique peut, dans certains cas, décourager les investisseurs étrangers à venir investir à Maurice.
Quelle est la situation actuelle de Corexsolar International, alors que vous redoublez d’efforts pour obtenir un terrain qui constitue votre troisième option ? Pensez-vous pouvoir convaincre le CEB que vous pourrez acquérir ce terrain avant la date butoir du 19 mars ?
Nous avons finalisé la sécurisation foncière avec un autre partenaire dans la région du nord et avons transmis l’ensemble des éléments au CEB. Ce dernier nous a déjà donné son approbation sous certaines conditions, notamment qu’aucun changement ne doit être apporté aux conditions initiales figurant dans le PPA.
Nous sommes actuellement dans une année électorale, ce qui pourrait potentiellement entraîner un changement de gouvernement d’ici environ un an. Avec les nombreuses critiques émises par l’opposition, notamment la suggestion de créer une commission d’enquête sur toute cette affaire, quel est votre état d’esprit ?
Corexsolar International est une société bien ancrée à Maurice, qui a déjà fait ses preuves. Nous n’avons aucun parti pris. Nous sommes un opérateur sérieux et indépendant, qui emploie une trentaine de personnes, tous des Mauriciens, et qui est appelé à travailler avec différents partenaires sur la réalisation de nos projets. Nous entretenons de bonnes relations d’affaires avec tous nos partenaires.
Nous avons répondu à un appel d’offres et avons été lauréat parce que nous avions respecté toutes les conditions et avions la meilleure offre.
Quand prévoyez-vous de terminer le projet et de le connecter au réseau du CEB, si vous parvenez effectivement à le démarrer cette année ?
Une fois que nous aurons finalisé l’accord foncier et obtenu toutes les autorisations nécessaires, nous allons redoubler d’efforts pour compléter le projet dans les délais prescrits dans l’appel d’offres, c’est-à-dire 15 mois. Notre objectif est de finaliser l’ensemble des différentes phases du projet dans les meilleurs délais. Cela est à la fois dans l’intérêt de Corexsolar International et celui du pays, qui a pour objectif d’atteindre 60 % d’énergie renouvelable dans son mix énergétique d’ici 2030.